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De Moscou à Sotchi - Jeffrey D. Sachs

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De Moscou à Sotchi - Jeffrey D. Sachs  Empty De Moscou à Sotchi - Jeffrey D. Sachs

Message  Vivre Enrussie Mer 19 Fév 2014 - 6:41

http://lecercle.lesechos.fr/economistes-project-syndicate/jeffrey-sachs/221191561/moscou-a-sotchi
NEW YORK – Depuis ceux de Moscou durant l'été 1980 en pleine la Guerre froide, c'est la première fois que les Jeux Olympiques ont lieu en Russie. Bien des choses ont changé depuis du point de vue politique, mais les Jeux de Sotchi sont l'occasion d'examiner l'Histoire économique récente de la Russie et de considérer son avenir.

Beaucoup de gens qui se souviennent de l'écroulement de l'Union soviétique en 1991 et de la période tumultueuse qui a suivi croient que l'économie russe est aujourd'hui affaiblie et instable, loin derrière une Chine en plein boom. C'est faux ! Selon le FMI, en 2013 le revenu par habitant de la Russie (mesuré en parité de pouvoir d'achat) s'élevait à 18 600 dollars, presque le double de celui de la Chine qui est d'environ 10 000 dollars. Et d'après la Banque mondiale, l'extrême pauvreté y est quasi inexistante, alors qu'elle était de 11,8% en Chine en 2009 (année la plus récente pour laquelle les données sont disponibles).

Si l'économie russe a bénéficié récemment d'une politique macroéconomique efficace et du prix élevé du gaz et du pétrole, la chute du prix du baril de pétrole après 1985 a contribué à la crise économique en Union soviétique et en Russie à la fin des années 1980 et au début des années 1990. C'est un facteur important qui explique la difficulté de mise en œuvre des réformes économiques lancées par l'ancien président soviétique Gorbatchev et par le président russe Eltsine.

En 1992 et 1993 j'étais conseiller économique du Premier ministre Iegor Gaïdar et du ministre des Finances Boris Fedorov pour aider la Russie à combattre l'inflation et la pénurie des dernières années de l'ère soviétique et à entamer sa transition vers l'économie de marché. J'ai recommandé la stratégie de stabilisation macroéconomique qui avait donné de bons résultats en Pologne.

Cela supposait comme pour cette dernière une aide financière de la part des Etats-Unis, de l'Europe et du FMI au moment opportun. Malheureusement contrairement à mes recommandations (et à celles de beaucoup d'autres) l'Occident n'a pas bougé, ce qui a aggravé la crise économique et financière de la Russie. A cette époque j'ai interprété cela comme de l'incompétence de la part du gouvernement américain et du FMI. Mais en reconsidérant les choses aujourd'hui, il est évident qu'il s'agissait d'une stratégie délibérée des néoconservateurs américains comme le secrétaire à la Défense Dick Cheney pour affaiblir le nouvel Etat russe. Au milieu des années 1990 le gouvernement américain a également été complice du pillage des biens des entreprises publiques russes, notamment des sociétés pétrolières qui ont été privatisées sans aucun scrupule.

Néanmoins la Russie a su rebondir après ces années noires sans aide occidentale. Et bien que marquée par la corruption, son économie de marché est maintenant enracinée. Après plusieurs années de conflits politiques internes et de retards non justifiés, elle a achevé sa stabilisation macroéconomique et restauré sa croissance - ce qui a été favorisé par la hausse du prix du pétrole et du gaz. Entre 2001 et 2013 son PIB a augmenté au rythme enviable de 4,4% par an en moyenne.

Elle a aussi en bonne partie stabilisé son système financier. Le FMI estime son inflation à 6,9% en 2013, son chômage à 5,5% et son déficit budgétaire à seulement 0,3% de son PIB. Par ailleurs elle dispose de 500 milliards de dollars de réserves en devises étrangères.

Elle pourrait faire encore mieux en utilisant deux moteurs de croissance plutôt qu'un seul. Le pétrole et le gaz vont continuer à doper sa croissance dans les années à venir, surtout grâce à la Chine qui devient l'un de ses principaux clients. Mais elle dispose aussi d'un vaste potentiel largement sous-exploité dans de nombreux secteurs de haute technologie.

Durant l'ère soviétique la Russie a produit des biens de haute technologie - des avions aux ordinateurs, en passant par des machines sophistiquées. Du fait de la Guerre froide et de la planification soviétique, contrairement à celle de la Chine, la production industrielle russe était presque complètement déconnectée des marchés mondiaux. Quand la Russie post-soviétique s'est ouverte au commerce, son industrie était largement à la traîne en matière de la haute technologie, notamment dans le secteur de l'information et de la communication.

En raison de négligences, du manque de partenaires internationaux et du chaos financier, beaucoup de secteurs industriels se sont effondrés. Certains ont difficilement survécu, avec un volume de production très diminué, essentiellement à destination des pays de l'ex-Union soviétique.

La Russie a le savoir-faire, les compétences et les ressources naturelles pour devenir compétitive sur les marchés mondiaux dans un grand nombre de secteurs de haute technologie tels que le nucléaire, l'aviation civile, l'industrie spatiale (satellites et GPS), les technologies de l'information, les véhicules électriques, le train à grande vitesse, la pétrochimie et le matériel lourd pour l'exploitation minière et pétrolière. Tous ces secteurs bénéficieront d'une demande potentielle énorme dans des marchés de taille en Chine, en Afrique et en Inde.

Mais parvenir à une croissance durable reposant sur la haute technologie suppose un environnement favorable aux investissements du secteur privé, ouvert aux acteurs étrangers. Le contexte politique et social doit également susciter la formation d'une main d'œuvre hautement qualifiée en offrant une qualité de vie attractive, en garantissant les libertés individuelles et en soutenant l'entreprenariat et la créativité. Enfin, la politique économique doit favoriser les progrès techniques et la coopération internationale dans la haute technologie.

La Russie a signé récemment un accord avec la Hongrie pour y financer une centrale nucléaire et elle va probablement faire de même avec la Turquie. En raison de la politique de décarbonisation adoptée à l'échelle mondiale, la demande en énergie nucléaire va augmenter, ce qui est prometteur pour son industrie nucléaire dont les nouveaux réacteurs paraissent sûrs et compétitifs. De la même manière, elle pourrait introduire de nouveaux avions civils sur le marché mondial de l'aviation en partenariat avec des sociétés internationales, notamment celles qui sont susceptibles de collaborer avec leurs homologues russes dans le domaine des nouvelles technologies de l'information appliquées à l'aéronautique.

En 1991 nombre d'observateurs pensaient que la Russie ne pourrait ni mettre fin à une inflation importante, ni adopter l'économie de marché et devenir compétitive sur la scène internationale. Vingt ans plus tard, elle a prouvé que les sceptiques se trompaient. Certes, elle est encore trop dépendante du pétrole et du gaz et devrait évoluer vers davantage de transparence, et d'ouverture en matière de commerce et de gouvernance, mais la tendance est positive. La Russie dispose d'une économie de marché stable et à haut revenu, avec en perspective des décennies de croissance rapide et de progrès dans le domaine de la haute technologie si elle poursuit une stratégie économique judicieuse au cours des prochaines années.

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