Quand l’UE se tire une balle ukrainienne dans le pied - Françoise Compoint
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Quand l’UE se tire une balle ukrainienne dans le pied - Françoise Compoint
http://french.ruvr.ru/radio_broadcast/217362642/268946913/
Obstinément, malencontreusement, l’UE continue à jouer la carte washingtonienne. Diabolisant la Russie dans le cadre de la scission ukrainienne, les politiques occidentaux prévoient des sanctions économiques, voire, pour une infime partie d’entre eux, militaires. Ils oublient pourtant que leurs pays en pâtiront les premiers. Se cramponnant à la thèse de l’annexion russe de la Crimée, ils n’ont pas conscience de friser le ridicule car il suffit de rappeler leur traitement du dossier kosovar. Perdant toute crédibilité, c’est en fait la guerre informationnelle qu’ils perdent.
En effet, il se trouve que 80 % des sondés allemands (sondage réalisé par le quotidien allemand Der Tagesspiegel) considèrent que l’Occident fait montre d’hypocrisie dans sa façon de présenter la crise ukrainienne et plus particulièrement dans l’éclairage qu’il donne du rôle de la Russie dans la résorption de cette crise. 80% : ce chiffre étonnerait moins s’il nous venait de France, mais quid de l’Allemagne où le processus de décrédibilisation des médias semble bien plus timide ? Cette rupture de confiance est significative dans le mesure où elle fait pendant à un autre sondage tout à fait récent selon lequel près de 75 % des sondés issus des pays membres de l’UE estiment que l’UE est peu efficace ou entièrement inefficace. Invité à participer la semaine dernière à l’émission de débat suisse Infrarouge, l’universitaire et slaviste de renom Georges Nivat a rappelé la mission de médiation et de paix que serait dans l’idéal celle de l’UE par strict contraste avec l’enjeu expansionniste militaire des USA. Cette optique est aussi utopique qu’historiquement fausse quand on sait que Jean Monnet, père avec Robert Schuman de l’Europe, était un agent d’influence américain et que le projet européen en tant que tel était financé par l’ACUE. En découle que déjà à ses débuts l’UE était perçue comme le supplétif soi-disant diplomatique des USA, ce qui se confirme d’ailleurs par l’intégration à l’OTAN de la majeure partie des pays de l’UE. Faut-il donc s’étonner plus longtemps de toutes les soi-disant erreurs suicidaires de Bruxelles sachant qu’il n’a aucune autonomie, que ce soit sur le plan militaire ou, a fortiori, idéologique ? Comparons à ce titre deux prises de parole révélatrices. La première est celle d’Obama en personne. Il s’agit d’un extrait de sa conversation téléphonique avec Poutine, le 6 mars 2014 :
« Seul Washington a le droit d’intervenir en Ukraine (…). Seul le gouvernement de Kiev (…) est légitime et démocratique ». Cet extrait, authentique, a été repris par Paul Craig Roberts, auteur de la loi Kemp-Roth, anciennement rédacteur en chef adjoint au Wall Street Journal et rédacteur à la National Review. On voit en l’occurrence que le Président américain ne justifie pas sa position, il la livre telle quelle, arguant tacitement le statut de supériorité des USA.
Voici maintenant le commentaire de Laurent Fabius sur l’autodétermination criméenne :
« En droit international, on ne peut pas faire un référendum pour modifier des frontières. Imaginez un département de France qui demande son indépendance ! Et si cela se généralisait à d’autres Etats … Après, tout dépend de la question qui va être posée. S’il s’agit d’aller vers davantage de décentralisation, d’accord. Mais si, en revanche, c’est une manière de changer les frontières, cela pose problème ». Non, serait-on tenté de répliquer, ce n’est pas ça qui pose problème. Ce qui pose réellement problème, c’est la manière tendancieuse dont le droit international est appliqué. Si on suit la logique énoncée par M. Fabius – et celle-ci est tout à fait exacte – l’indépendance accordée au Kosovo en 2007 est illégale, cela d’autant plus qu’elle représente une violation de la résolution 1244 relative au principe d’unité territoriale de la Serbie (1999). Des deux prises de position, on ne sait même pas laquelle privilégier, l’une pêchant par son autosuffisance, l’autre par son mal-fondé empirique. Partant, comment s’étonner de l’échec informationnel des médias occidentaux ainsi que de l’impasse dans laquelle se trouve à l’heure actuelle les politiques de l’UE dont la situation est déplorable. Que faire ? Reculer ? Mais il faudrait alors inventer un motif niais comme cela a été fait dans le cas de la Syrie où l’on fait mine de ne découvrir que maintenant, au bout de trois ans, de un, une prédominance salafiste incontestable au sein d’une opposition qui est tout ce qu’on veut sauf syrienne, de deux, un conflit d’intérêt extrêmement violent entre les islamistes sponsorisés notamment par le Qatar, l’Arabie Saoudite et l’Irak. Que devrait-on découvrir maintenant par rapport à l’Ukraine et plus particulièrement la Crimée pour donner carte blanche à la Russie ? Le droit constitutionnel d’une République autonome à s’autodéterminer ? Le droit de la Russie et même son devoir constitutionnel de protéger une population composée à presque 60 % de Russes de souche et d’un pourcentage important d’Ukrainiens ou Tatars russophones et (ou) russophiles ? Le droit de la Russie à la sauvegarde de ses intérêts géopolitiques ? Mais ce serait en somme banal. Aussi banal qu’inévitable.
Si en revanche, épaulé par Washington, Bruxelles pousse le bouchon trop loin en imposant à la Russie des sanctions économiques d’ailleurs désapprouvées par la majeure partie des européens eux-mêmes, il se tirera tout bonnement une balle dans le pied. Imminente, la riposte russe inclura des mesures radicales et désastreuses pour les pays de l’UE telles que l’acquisition des devises asiatiques à la place des devises occidentales, la confiscation des actifs occidentaux, la réorientation de son commerce vers la Chine et la Corée du sud, voire – possibilité envisagée par certains économistes - le renoncement au dollar dans les échanges commerciaux. La participation au projet américain d’otanisation de l’Ukraine, vaudrait-elle de tels sacrifices pour l’Europe ?
Heureusement qu’il y a encore des hommes politiques comme Jean-Pierre Chevènement, François Fillon, Marine le Pen ou Jean-Luc Mélenchon qui échappent à cette logique de soumission aux ordres de la Maison-Blanche en redressant l’image de la France sur la scène internationale.
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