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Russie-UE : patience et prudence ne signifient pas cynisme et complaisance - Par Isabelle Facon

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Russie-UE : patience et prudence ne signifient pas cynisme et complaisance - Par Isabelle Facon Empty Russie-UE : patience et prudence ne signifient pas cynisme et complaisance - Par Isabelle Facon

Message  Vivre Enrussie Mar 26 Juin 2012 - 19:30

25/06/2012 - http://www.lemonde.fr/idees/article/2012/06/25/russie-ue-patience-et-prudence-ne-signifient-pas-cynisme-et-complaisance_1723917_3232.html

Dans les relations avec Moscou, patience et prudence ne signifient pas cynisme et complaisance.
Avant de s'interroger sur le comment, il faut réfléchir au pourquoi : pourquoi les pays européens n'ont-ils d'autre choix que d'entretenir des relations étroites avec la Russie, qui, réaffirmant sa puissance de façon parfois agressive, complique la tâche des dirigeants occidentaux, soumis à la pression d'opinions publiques préoccupées par les lenteurs perçues de la démocratisation et de la modernisation de ce pays. Il faut dire que cet enjeu suscite des positions tranchées.

Les critiques les plus acerbes de la politique des Européens vis-à-vis de la Russie en fustigent le cynisme, les accusant de sacrifier la défense des valeurs européennes à de froids intérêts économiques - a fortiori en période de crise, car l'économie russe, malgré sa vulnérabilité, constitue un marché relativement attrayant ; les budgets prévus pour les achats d'armement (plus de 600 milliards de dollars sur 2011-2020) suscitent des espoirs chez certains industriels. En parallèle, ceux qui sont attachés à la recherche d'un lien fort entre l'Europe et la Russie usent d'arguments qui ne sont qu'à moitié convaincants. Moscou serait, selon eux, un partenaire incontournable pour la gestion de problèmes internationaux majeurs du fait de sa situation au carrefour de plusieurs grandes zones stratégiques et de son siège de membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU.
Pour autant, le poids réel de la Russie sur la scène internationale est souvent surestimé, comme l'a démontré, avant la Syrie, l'échec partiel ou total de ses efforts de médiation entre l'Occident d'une part, la Serbie, l'Irak, l'Iran d'autre part, ou entre les parties au conflit israélo-arabe... D'autres disent craindre que la Russie tourne le dos aux Européens au profit de la Chine si les premiers ne se montraient pas suffisamment souples envers Moscou. Or, le lien économique, énergétique mais aussi culturel et politique avec l'Europe est trop essentiel pour que la Russie s'en détourne, ce qui d'ailleurs donne aux Européens des marges de manœuvre - pour peu qu'ils veuillent bien les saisir et les mettre à profit.

Cependant, la coopération avec la Russie demeure une nécessité pour gérer les défis continentaux - des conflits à la sécurité énergétique en passant par les criminalités et le terrorisme. Elle évite sa marginalisation, qui, pour de nombreux responsables européens, serait lourde de risques pour la sécurité du continent. C'est cela, plus que des enjeux internationaux ponctuels ou des intérêts économiques, aussi importants soient-ils, qui dicte aux Européens une politique précautionneuse à l'égard de Moscou. Trop précautionneuse voire complaisante, estiment les opinions, qui, parfois mal informées, souhaiteraient que les divergences sur les droits de l'homme et sur les libertés démocratiques aient des conséquences plus marquées sur les relations interétatiques.

L'absence ou la faiblesse des critiques ne signifient pas que le manque de convergence sur un certain nombre de principes fondamentaux n'a aucun impact et que les pouvoirs européens sont aveugles ou ferment les yeux. Le déficit de confiance qui découle de la situation russe, politique (pression sur certains médias, manque d'indépendance de la justice...) ou institutionnelle (corruption au sein des organes de l'Etat, manque de transparence sur les questions de propriété, instabilité du cadre législatif...), a des répercussions tangibles. La vente du BPC Mistral a certes fait couler beaucoup d'encre ; il n'en demeure pas moins que les transferts de technologies occidentaux vers la Russie sont bien moins amples que ce qu'ils pourraient être vingt ans après la fin de la Guerre froide.

L'ouverture des grands groupes occidentaux au capital russe reste limitée. Cela empêche la Russie de bénéficier de savoir-faire et d'échanges utiles pour stimuler sa modernisation. De même, si certains Etats européens se sont montrés attentifs à la demande russe d'une architecture de sécurité européenne renouvelée, ils sont loin de lui avoir donné satisfaction, lui demandant par exemple des précisions sur la manière dont "l'indivisibilité de la sécurité" qu'elle réclame peut s'appliquer aux Etats du voisinage commun à la Russie et à l'Europe. La lenteur des négociations sur un nouvel accord cadre Russie-UE ou l'existence de plans de l'OTAN pour la défense de certains pays membres contre la Russie sont d'autres symboles de ce "plafond de verre" qui constitue en soi une sanction, de ces lignes rouges qu'il appartient à la Russie de percevoir et de faire reculer par une mise en convergence progressive de ses choix internes et internationaux avec les nôtres, quand cela est possible.

Cette approche est sans doute lente dans ses effets, et source de frustrations mutuelles qui ralentissent l'intégration à l'échelle continentale. Mais d'une part, elle offre aux Européens une possibilité de transcender les différences qui les opposent sur la "question russe", empêchant celle-ci de compromettre trop fortement leur unité. D'autre part, appliquée à un pays engagé récemment sur la voie de la démocratisation et inquiet pour sa souveraineté, elle peut s'avérer sur le long cours plus efficace qu'un discours vague et instable sur les valeurs. Valeurs dont les responsables occidentaux sont conscients qu'elles sont élastiques et relatives dès lors que des intérêts, y compris les leurs, sont en balance.

Dernier ouvrage paru : Russie, les chemins de la puissance, Artège, 2010

Isabelle Facon, Maître de recherche à la Fondation pour la Recherche stratégique, Maître de conférences à l'Ecole polytechnique.

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