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Sarkozy captif de la maison Russie - ANDRÉ GLUCKSMANN

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Message  Vivre Enrussie Mer 10 Mar 2010 - 10:02

10/03/2010 - www.liberation.fr/monde/0101623543-sarkozy-captif-de-la-maison-russie

extrait:
Les lauriers de Mme Thatcher obsèdent les leaders occidentaux. Ne passe-t-elle pas pour avoir «inventé» Gorbatchev, en l’adoubant prophétiquement ? Si la fin de la guerre froide, c’est lui, l’aura qui le nimbe, c’est elle. Pareils miracles n’ont lieu qu’une fois, après, la surprise...

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Sarkozy captif de la maison Russie - ANDRÉ GLUCKSMANN Empty Re: Sarkozy captif de la maison Russie - ANDRÉ GLUCKSMANN

Message  Vivre Enrussie Jeu 11 Mar 2010 - 11:53

Les lauriers de Mme Thatcher obsèdent les leaders occidentaux. Ne passe-t-elle pas pour avoir «inventé» Gorbatchev, en l’adoubant prophétiquement ? Si la fin de la guerre froide, c’est lui, l’aura qui le nimbe, c’est elle. Pareils miracles n’ont lieu qu’une fois, après, la surprise s’évente. Pourtant, l’Elysée entend reproduire le sortilège avec Dimitri Medvedev. Effacées comme par magie ses longues années de loyaux services poutiniens, le nouveau prince charmant conquiert les quais de la Seine et les stratèges élyséens discréditent comme «angélique» ou «droit-de-l’hommiste» toute critique touchant la nouvelle lune de miel franco-russe. A mes yeux c’est l’inverse : la grande fraternisation Paris-Moscou ne relève pas du réalisme, mais d’une conduite magique et de ses faux calculs.

Le rêve de transmuer à distance la politique du Kremlin berce l’Occident depuis longtemps. Certes, Poutine s’est révélé bien plus coriace que ne le prévoyaient Blair lorsqu’il l’invita à l’opéra, Bush lorsqu’il lut «good guy» dans le bleu de ses yeux, Chirac lorsqu’il lui épingla la grand-croix de la Légion d’honneur et Schröder qui lui vendit son âme et son carnet d’adresses. N’épargnant pas les civils - 200 000 Tchétchènes tués -, bafouant les bonnes manières démocratiques, administrant quotidiennement la preuve que le KGB n’est pas l’ENA, le tsar moderniste qu’on nous promettait n’a pas tenu son rôle. Rebelote : si Poutine n’est pas un démocrate, il nous offre sur un plateau d’argent un nouveau Gorbatchev.

Certes, Medvedev se vante, en élève méritant et un tantinet prétentieux, d’avoir lui aussi gagné sa guerre du Caucase - «La Géorgie, c’est moi !» roucoule-t-il, occupant 20% d’un pays souverain et piétinant les accords de cessez-le-feu signés en août 2008 sous l’égide de… Nicolas Sarkozy. Est-ce une raison supplémentaire pour multiplier les «symboles de confiance» et lui fournir des armements dernier cri ? Outre quatre porte-hélicoptères Mistral, Paris envisagerait la vente de tanks légers amphibies Panhard (AFP, 2 février) et la rénovation par Turbomeca des hélicos poussifs Ka-60 (Interfax, 25 février).

Vive la Géorgie, Monsieur ! Imaginez la fervente reconnaissance que vouent aujourd’hui à la «patrie des droits de l’homme» les peuples, qui, de la Baltique à la mer Noire et la Caspienne, subissent les menaces régulières de leur immense voisin… Ils lisent dans la doctrine militaire publiée par «l’ami» Medvedev que l’Otan est l’adversaire n°1, bien avant le terrorisme, la prolifération nucléaire et Ahmadinejad. Ils lisent l’option envisagée de guerres préventives dans le «proche voisinage», fussent-elles nucléaires.

Rien là n’empêche Paris de vouloir mettre au top la deuxième armée du monde. La campagne présidentielle de Sarkozy est loin. Pourquoi pareil revirement ? Les affaires sont les affaires ? Les gros sous n’expliquent pas seuls le tête à queue. On ne fait pas de bonnes affaires en s’abusant sur les dispositions prêtées au partenaire. Le pataquès Areva-Siemens devrait éclairer les ingénus. En 2009, le trust allemand Siemens rompt sans crier gare avec le français et s’associe illico au russe Rosatom pour construire des centrales nucléaires concurrentes. Dindon de la farce, la France n’a rien vu venir. Combien de Mistral faudra-t-il fourguer pour compenser la vente ratée d’une seule centrale ?

Realpolitik donc ? Non. Loin de pêcher par réalisme (aux dépens des droits de l’homme), la nouvelle politique russe de la France pêche par naïveté (aux dépens d’une estimation rationnelle et raisonnable des partenaires). Un tropisme néocolonial a précipité l’industrie allemande sur le Far East. Pris à l’improviste, le gouvernement français s’efforce d’attraper le train en marche, et, comme tout nouveau converti, il surenchérit sur les espérances germaniques en misant sur le marché de la mort. Est-il sérieux ou réaliste de prétendre que les ventes d’armes encouragent les réformes et inhibent les passions impérialistes ?

Medvedev n’est pas, jusqu’à nouvel ordre, le successeur de Poutine, il en est le colistier, la doublure, voire le «plastron», ainsi appelle-t-on dans la littérature classique le valet qui détourne les coups, quitte à passer pour tête de Turc. Poutine demeure le patron et l’émancipation du plastron se fait attendre. Il reste deux ans à Medvedev, entend-on à Paris, c’est une fameuse «fenêtre d’opportunité». Deux ans ? Et après quoi ? Et après qui ? Medvedev dénonce le «nihilisme judiciaire». Et après quoi ? Rien. 20 000 Tchétchènes pourrissent en Sibérie, Khodorkovsky semble condamné à vie pour avoir défié Gazprom, les commanditaires des meurtres de journalistes, d’avocats, d’opposants ne sont pas inquiétés, mais les assassins libérés, les rares flics qui dénoncent la corruption se retrouvent embastillés, les oligarques prospèrent au bon plaisir du chef. Quelques purges s’opèrent dans l’obscurité, sans qu’on sache qui a fait quoi. Si les officiels français prétendent voir clair dans ce pot-au-noir, où trouvent-ils leur lumière ? Quelle présomption les pousse à se croire capables de manipuler Moscou ? Ce «réalisme» porte un nom : rêve de toute-puissance.

Un argument imparable est ressassé ad nauseam aux abrutis que nous sommes : «La guerre froide est finie !» Voilà qui est indiscutable, et visionnaire ! Elle est finie depuis vingt ans. Entre-temps, deux guerres de Tchétchénie, trois en ex-Yougoslavie, une en Géorgie, tensions en Ukraine, etc. Dans ces crises graves traversées par l’Europe depuis 1989, la Russie fut-elle un partenaire fiable ? Il ne suffit pas de proclamer la fin de la guerre froide pour que règne l’harmonie préétablie entre l’aigle à deux têtes du Kremlin et les 27 étoiles de l’UE. Lorsque Vladimir Poutine qualifia la dislocation de l’URSS de «pire catastrophe géopolitique du XXe siècle», Dimitri Medvedev ne trouva rien à redire. Au contraire, à peine nommé Président, il entreprit la première annexion territoriale de facto sur le vieux continent depuis la chute du Mur. Un minimum de prudence s’imposerait.

Lorsqu’un Président reçoit un autre Président, il est de bon ton qu’il soit poli et souriant, voire qu’il tombe dans ses bras. Mais pas qu’il s’éblouisse, au risque de se retrouver captif de son fantasme.

Commentaire:
charboy a écrit: Il a bu Glucksmann avant d'écrire ? ou alors il a pris la dictée de Bush
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